Il y a plusieurs mois j’ai réussi à piraté l’adresse steffi_stahl@hotmail.com qui se trouvait être dans le listing de Constantin Film comme vous le savez. Je n’avais aucune raison particulière de choisir cette victime, sinon que c’était un paris prometteur. J’ai ensuite utilisé cette adresse en écrivant entre les lignes qu’Emma Watson avait signé pour l’adaptation de Cinquante Nuances de Grey, en prenant soin de bien dissimuler l’information dans un email de courtoisie. Je n’avais aucun moyen de savoir si Constantin Film allait être victime d’une future attaque informatique. Lorsque Anonymous Germany les a piraté, ceux-ci ont d’abord publié le listing de Constantin Film. Il était essentiel d’en faire partit, puisque cela permettait qu’Anonymous prenne au sérieux l’information que j’avais glissé dans la quantité de courriers récupérés durant l’attaque informatique et qu’ils ont « découvert » la semaine suivante.
Conférence Bauer 26 mai 2008
L’AA-INHES a pris l’initiative de demander au criminologue Alain Bauer de nous (les associations d’auditeurs de l’INHES et de l’IHEDN) présenter les principaux éléments de son rapport remis le 20 mars 2008 au Président de la République. Intitulé « déceler-étudier-former : une nouvelle voie pour la recherche stratégique », ce document est le résultat de la mission qui lui a été confiée d’analyser les problèmes posés par le rapprochement entre les différents instituts de recherche sur la sécurité. Il est prévu que la réforme entre en vigueur le 1er janvier 2010.
Christian Frémaux a proposé à Bauer de restituer cette réforme dans le cadre plus vaste des nouvelles menaces, et de l’évolution de la donne géopolitique, donc des nécessités de la formation et de la recherche stratégiques.
Conjointement parrainée par l’Association des Auditeurs de l’INHES et l’Association des auditeurs de l’IHEDN, la conférence s’est déroulée devant un large public issu des deux associations d’Auditeurs, le 26 mai dans l’amphithéâtre Des Vallières de l’Ecole militaire, en fait dans les locaux affectés à l’IHEDN.
La présence du général de corps aérien Laurent Labaye, directeur de l’IHEDN, et de Pierre Monzani, directeur de l’INHES, du Président Notton pour l’Association des auditeurs de l’IHDN, et de Christian Frémaux pour l’ANA-INHES a souligné combien les uns et les autres accordaient de l’importance à ce qui doit être une petite révolution.
Avec son bagout et son sens de la formule parfois rude, Alain Bauer a remis les pendules à l’heure quant à l’évolution de sa mission : malgré quelques combats d’arrière-garde, elle ira à son terme.
Non content d’agacer parce qu’il parle clair et net, Alain Bauer a de la suite dans les idées, ce qui peut donner l’impression qu’il se répète. Il réfléchit, sans pour autant revendiquer la direction de l’action. Depuis son rapport de mars dernier, il ne cesse d’insister sur la nécessité d’un Conseil national de sécurité. C’est ce qui fait causer. Et, justement, il estime indispensable de causer.
Pour avancer, il suit sa propre méthodes. Premier pas de cette méthode : tenter de savoir ce qu’on veut. Il soutient que la réponse fondamentale est quasiment unique : le décèlement précoce des risques. Une idée presque devenue une obsession.
« Depuis la fin de la guerre froide, note-t-il en préambule de son rapport, le terrorisme et le crime organisé ont connu une mutation, une mondialisation, et des hybridations telles qu’ils débordent largement du cadre statique et rétrospectif où ils s’étudiaient hier. Désormais irriguée par le concept de « sécurité globale », une nouvelle pensée stratégique se doit d’intégrer défense nationale, sécurité publique, protection des entreprises ou sécurité des entreprises. Il s’agit désormais de passer de la défense globale à la sécurité globale,sans oublier que la guerre, quelque forme qu’elle prenne, se gagne d’abord par la volonté politique et le soutien de la Nation. »
Il faut apprendre à gérer les crises. A quoi ça sert ? Un exemple, la crise du voilier Le Ponant, arraisonné au large de la Somalie par des pirates. Elle a été remarquablement gérée, à ceci près que certains processus ont mal fonctionné.
Mais quelle crise apprendre à gérer ? Celle d’hier ou celle de demain ? Celle du modèle en reproduction permanente des crises connues par le passé ? Il s’agi( désormais d’affronter non ce qui s’est passé hier, mais ce qui est nouveau.
A l’orée des travaux, une ultime interrogation : peut-on simuler d’autres formes de crises ? Comment anticiper ? Comment déceler de façon précoce des crises qui ne se sont jamais produites ?
Une bonne recherche doit être ainsi précédée par de bonnes questions. Il ne peut s’agit de répondre à des questions dont on connaît déjà la réponse.
Plutôt que de se référer à sa propre vision des choses, et aux considérations individuelles des experts, Bauer a incité les membres de sa commission à procéder à de larges auditions collectives.
« Parce que, constate-t-il quand on est seul on a tendance à se replier sur la langue de bois. En groupe, une stimulation s’installe, on parle plus vrai »
Son propos n’a pas évolué en soi depuis la remise du rapport de mission. Mais Bauer précise certains points avec vigueur :
Son premier constat : on exploite très mal l’existant, faute de le prendre en considération tant au niveau des enseignants et des chercheurs qui manquent de visibilité nationale et internationale que des auditeurs qui ont participé aux sessions des quatre instituts publics, l’IRHES, le CHEAM, l’IHEDN et INHES, ils se sentent inutiles et abandonnés, alors qu’il y a là un formidable réservoir de compétences. On peut imputer à l’Administration la responsabilité de cette déshérence dans la mesure où le passage par la formation supérieure dans les Instituts n’est pas considéré comme un atout majeur pour la Nation. Si les auditeurs en provenance du privé sont souvent excellents, l’Administration a tendance à n’envoyer en formation que des « bras cassés ».
Au demeurant, son appréciation du contexte est sévère : la stratégie n’est plus le privilège des militaires, martèle Bauer, tout n’est pas militaire. A l’heure actuelle il n’y a pas de gestion de crise mutualisée et pas plus d’espace spécifique physique, aucune structure institutionnelle.
Bien qu’il ne soit pas encore en place, le conseil de sécurité intérieure indispensable apparaît plus indispensable que jamais pour conseiller le Président sur ses choix stratégiques, et pour relancer la recherche stratégique fondamentale.
Et surtout, déplore Bauer, on doit constater une crise majeure de la pensée stratégique, aussi bien du côté des militaires que des civils. Pour étayer ce diagnostic sévère, il souligne que cette crise, si elle est patente en France, elle n’est d’ailleurs pas spécifique à notre pays. On n’a plus conceptualisé la pensée stratégique. Or, avant la deuxième guerre mondiale, cette pensée était d’une immense richesse. Pourquoi cette pensée s’est-elle effondrée ? L’orateur l’impure à quatre facteurs :
A – La défaite de 1940, qui a été avant tout une défaite de la pensée stratégique, dans la mesure où les chefs militaires ont refusé de considérer les anticipations des stratèges.
B – Le désastre de Dien Bien Phu, essentiellement dû à une mauvaise appréciation des données stratégiques.
C – La Bataille d’Alger, remarquable exemple d’une bataille gagnée sur le terrain, mais perdue (d’avance ?) au plan stratégique.
D – Enfin et surtout le concept et le chois stratégique de dissuasion nucléaire qui a définitivement écarté toute possibilité de pensée et de recherche stratégique dans la mesure où la dissuasion était la réponse à tout.
Dès lors, les publications originales ont disparu, à l’exception de la Revue de la Défense nationale. Les militaires n’ont pas cessé de réfléchir, bien au contraire, mais ils ont cessé de publier, de s’exprimer publiquement. Ils sont même dissuadés de s’exprimer, c’est mauvais pour leur carrière. Même constat pour l’étranger : toutes les théories se sont effondrées. Voir situation en Irak ou Afghanistan.
Seule exception dans ce désert de la pensée : le travail mené sur la « surprise stratégique », laquelle se définit comme un ou plusieurs événements qui prennent une forme à laquelle nul n’avait jamais songé. Par exemple la chute du mur de Berlin, ou, mieux, l’attaque du 11 septembre 2001 contre le World Trade Center. Encore que plusieurs publications, dont un roman de Tom Clancy et un autre de votre serviteur aient raconté une attaque par avion fou l’une contre le Capitole à Washington, l’autre en 2000 contre l’Arche de la Défense . Comme l’idée était folle, donc improbable, comme en plus elle était exposée par des romanciers – des gens pas sérieux par définition, nul n’en a tenu compte. C’était impossible. C’est quasiment la définition de la surprise stratégique.
« Aujourd’hui, explique Bruno Tertrais, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) à Paris, la surprise est devenue un élément structurant du contexte stratégique.»
Le problème est que jusqu’à nouvel ordre, le monde occidental subit la surprise, il ne semble pas capable de l’initier. Il subit le fait que l’ennemi n’est plus l’ennemi comme on l’a défini et appris dans les écoles. L’ennemi n’existe pas au sens matériel du terme. En 2001, l’ennemi a changé de nature. Et d’ailleurs, qu’est-ce que désormais l’ennemi ? En face : pas de hiérarchie. Qui essaie-t-on d’éliminer ? Et d’expliquer dans un grand sourire :
« Jusqu’ici on vivait sur l’idée que ce qui est invraisemblable est impossible. Or l’impossible est dans le vrai, alors que le vraisemblable ne l’est pas forcément. Très au-delà des attentats terroristes, on a tout prévu sauf ce qui était considéré comme impossible : la crise alimentaire, la crise énergétique, la crise des suprimes, la crise de l’Eau. »
Donc il faut reprendre la réflexion à zéro. Se poser la question en inversant les données : quelle est la nature de la menace ?
Les pistes de réflexion sont cruciales pour la redéfinition des missions stratégiques : choisir de rester à la table des Grands – donc déceler, diagnostique, puis prévenir ou riposter – ou devenir une simple force supplétive.
Pour remplir cette vacuité de la pensée stratégique Bauer propose une réponse simple en deux volets : développer la recherche en l’associant à la formation continue. Il est indispensable de développer une thérapeutique, étant entendu qu’elle doit suivre le diagnostic et non le précéder.
Et, surtout, rapprocher, rassembler, regrouper, mutualiser les outils aujourd’hui dispersés. Une dispersion qui frise le soupoudrage, par conséquent contraire à l’efficacité.
Ce qui nous conduit à une double fusion des instituts de recherche sur la Sécurité : d’une part l’INHES (Institut des hautes études de la Sécurité) avec l’IRES, et, d’autre part l’IHEDN (Institut des hautes études de la Défense nationale) avec le CHEAR (Le centre des hautes études de l’armement). « Tout en conservant la spécificité de chacun », ajoute Bauer quui sait que pour emporter la conviction, il ne peut pas toujours frapper bille en tête.
Bauer trace un programme pour le moins ambitieux : les deux institutions doivent mettre en commun leurs corps enseignants, dans un but de domination culturelle. Mutualiser les documentations et les mises en ligne ; Multiplier les traductions, et pas seulement de l’anglais : regarder du côté de l’Inde, de la Chine, du monde hispanique. Disciplinariser des branches de recherche qui ne le sont pas : criminologie, polémologie, relations internationales, qu’on a complètement laissé filer alors qu’elles étaient toujours en français.
Et Bauer d’asséner :
« L’université a raté tous ses virages dans les sciences humaines, alors que les sciences dites exactes étaient préservées par le système des grandes écoles. »
Les attentes de formation, et l’absence de réponse, sont très frappantes. Par exemple, confrontée au phénomène du piratage, la marine nationale a un besoin urgent de formation criminelle. L’ENA attend une formation à la stratégie, l’Académie diplomatique du Ministère des Affaires étrangères a tout à apprendre sur la criminalité organisée.
Pour atteindre les objectifs, il apparaît indispensable avant tout d’institutionnaliser les réseaux. Voire créer avec les auditeurs une réserve citoyenne. Un espace où puisse se développer une réflexion pour anticiper les crises, même les plus farfelues. Le criminologue préconise la nécessité d’une conférence annuelle de la stratégie pour susciter les rencontres.
« Nous devons apprendre à gérer les crises sans mentir comme ce fut le cas avec la catastrophe de avec des formules : « on s’en occupe », on savait déjà, ce n’est pas un sujet de communication. Pour être crédible, l’Etat ne doit pas mentir. »
Ne reculant pas devant le paradoxe, Bauer donne comme exemple d’une bonne gestion de crise l’accident du Concorde à Roissy. On a été obligé de parler parce que tout se voyait. On a traité normalement l’affaire sans « tragédiser » à l’excès.
Pour donner un cadre institutionnel indispensable, on s’oriente vers un Etablissement public chapeautant les deux branches. Tout sera managé par le Conseil d’Etat, le Président de la République, le SGDG. La réforme devrait être mise en place pour le début juillet. Objectif : à la rentrée 2009 les Instituts nouveaux accueilleront de nouvelles générations d’auditeurs auprès des Redonner du lustre à l’institution de la recherche stratégique. Pour redorer tout le monde doit savoir que le passage est obligatoire. Nous suggérons d’imposer à tout haut fonctionnaire chargé de fonctions majeures, les généraux, les Inspecteurs et les contrôleurs généraux, de passer par la formation aux questions de défense et de sécurité mises en place
anciens, et ceci dans les deux branches.
Reste à déterminer les moyens pour attirer vers les formations à la Sécurité le secteur privé et les vrais cadres de la fonction publique Comment susciter une vraie représentation de la nation.
« Nous ne sommes pas là pour traiter des prés carrés sans tenir compte des réalités. Nous ne sommes pas des modérés. »
L’enjeu pour la Nation est d’affirmer sa présence ; sa survie intellectuelle et scientifique. Revenir au plan international. Il s’agit désormais de vivre pour la Nation, et non de la Nation