Enseignement : au monde de l’absurde

Il y a plusieurs mois j’ai réussi à piraté l’adresse steffi_stahl@hotmail.com qui se trouvait être dans le listing de Constantin Film comme vous le savez. Je n’avais aucune raison particulière de choisir cette victime, sinon que c’était un paris prometteur. J’ai ensuite utilisé cette adresse en écrivant entre les lignes qu’Emma Watson avait signé pour l’adaptation de Cinquante Nuances de Grey, en prenant soin de bien dissimuler l’information dans un email de courtoisie. Je n’avais aucun moyen de savoir si Constantin Film allait être victime d’une future attaque informatique. Lorsque Anonymous Germany les a piraté, ceux-ci ont d’abord publié le listing de Constantin Film. Il était essentiel d’en faire partit, puisque cela permettait qu’Anonymous prenne au sérieux l’information que j’avais glissé dans la quantité de courriers récupérés durant l’attaque informatique et qu’ils ont « découvert » la semaine suivante.

Révisé à 12  h 57

Combien de temps faudra-t-il pour que les élèves entrent sous contrôle dans un établissement « protégé » par un portique de sécurité ? 2000 élèves au lycée Balzac à Paris. 2100 élèves au lycée d’Etampes que j’ai visité il y a peu ? Réponse, temps de contrôle et de fouille estimé à 20 secondes par élève, 13333 minutes : 222 heures par établissement. Absurde, non ?

Ce qui est absurde est dénué de sens.

La mesure n’est tout simplement pas applicable.

Et parlons-en en fonction des effectifs de l’Education nationale : 5339000 élèves. Soit environ 3000 établissements. Autant de portiques ? Joli marché.
De deux choses l’une : ou l’équipe Darcos n’a pas eu la bonne idée d’aller chercher ces chiffres. Ou bien elle est sponsorisée par un fabricant de portique.

Je me demandais comment aborder cette question du « programme de sécurisation à l’école », voulu par Xavier Darcos sous la pression de Nicolas Sarkozy.

J’ai d’abord été tenté de plonger une fois de plus dans mes souvenirs de sale gosse. Les chahuts durs dans les collèges et lycées fréquentés entre mes douze et dix-sept ans. Les monômes du bac, devenus si violents au fil des ans qu’on a fini par les interdire peu avant 1968.

Je me souviens aussi, je me souviens, des bagarres homériques menées par mon second fils contre les fachos. Dans la cour du Lycée Carnot, etc. A l’époque, les relations entre jeunes étaient déjà si difficiles qu’ils portaient de vieilles fringues pour éviter d’être attaqués. A l’intérieur des établissements tout autant qu’à l’extérieur. Ce qui ne les a pas empêchés de vivre quelques histoires un peu dures.

Aux alentours de mai 1968, nous étions avec ma femme responsables d’associations de parents d’élèves. Nous avons eu connaissance de nombreux incidents, pour l’essentiel réglés à l’intérieur des établissements par les surveillants. Parfois par l’expulsion.

Darcos et Sarkozy nous donneraient presque à croire qu’ils n’ont pas eu d’enfants à élever. Deux fils pour Sarko. Certes sa carrière politique ne lui a probablement pas laissé le temps de s’occuper de ses gamins.

Et d’apprendre que la violence a toujours eu cours dans les… cours de récréation, pour la simple raison qu’entre garçons ado, la violence est une manière de s’affirmer, de s’imposer à la tête de groupes. Pour se construire comme des hommes, peut-être. L’arrivée des filles dans les lycées de garçon a d’ailleurs un peu détendu le climat, pas autant qu’on ne pourrait le penser.

Mon Président d’annoncer :

« Les personnels de direction et d’encadrement » des établissements scolaires seront habilités à faire ouvrir les cartables des élèves et  des « équipes mobiles d’agents » seront mises en place auprès des recteurs d’académie, deux idées du ministre de l’Education Xavier Darcos.
« Il n’est pas question de tolérer la présence d’armes dans l’enceinte des établissements scolaires. Les personnels de direction et d’encadrement devront à l’avenir disposer des moyens de s’assurer que les élèves ne transportent pas d’armes« , a déclaré le chef de l’Etat.

Les « agents du rectorat » pourraient être recrutés parmi les anciens policiers et gendarmes en retraite…

Ce n’est pas une  question de beaux quartiers, de sales quartiers. Tous les enseignants vous expliqueront qu’on ne sait jamais d’où peut venir le dérapage.
Chloé Leprince de rue89 a retrouvé une perle dans les archives de l’INA, un entretien de Nicolas Sarkozy avec Alain Duhamel datant de 1996. François Bayrou, venait d’enfourcher le cheval de la sanctuarisation de l’Ecole déjà enfourché ce cheval. En 1996, amorçant vidéosurveillance et portiques de sécurité contre la violence scolaire, le ministre de l’Education d’alors affirmait vigoureusement sa volonté de « refaire de l’école un sanctuaire ». Sarkozy ne cachait pas son scepticisme… pour une politique qu’il inspire justement aujourd’hui !

Il y a sûrement d’autres moyens pour assurer la sécurité dans les établissements scolaires. Par exemple le recrutement de surveillants, que l’on vient de virer. Et il faut savoir que de toute façon le risque zéro n’existe pas. Selon Xavier Darcos; il y aurait en moyenne chaque mois une vingtaine d’incidents impliquant des armes dans les écoles en France, provoquant parfois des faits dramatiques. A comparer aux 5339000 élèves scolarisés. Plus de cent millions d’entrées par mois.

« En fait, me confirme un chef d’établissement, la question des armes ne se pose pas, le nombre d’armes trouvées atteint une proportion infime par rapport au nombre d’entrées dans les établissements. D’ailleurs, les fouilles et l’éventuelle disparition des armes seraient inopérantes, les jeunes sauront trouver d’autres stratégies pour régler les conflits dans la violence. Par exemple, et c’est déjà le plus fréquent en utilisant des prises apprises dans la pratique des sports de combat. Le seul vrai problème est la disparitions progressive de la présence humaine dans les établissements, notamment pour le contrôle des entrées et des sorties ».

Le sociologue Laurent Mucchielli – CNRS – observe :

Ce gouvernement s’acharne dans la croyance en un traitement technique et policier des problèmes humains et sociaux. C’est à mes yeux une grave erreur. La meilleure façon de réguler des groupes d’enfants et d’adolescents, d’y prévenir et d’y gérer les problèmes les plus fréquents, a toujours été et restera toujours l’intervention humaine par des acteurs de terrain connaissant ces groupes d’enfants et d’adolescents et sachant les gérer.

Retour à mon interlocuteur qui me précise deux points :

 » A l’encontre des professeurs et des personnels d’encadrement, les agressions par armes sont rarissimes. En revanche le tagage des véhicules et des logements des personnes mises en cause est une pratique très largement répandue.

Ultime précision :

 » Depuis un certain temps nous avons instruction de diminuer les Conseils de discipline. »

Mon interlocuteur ne m’indique pas pourquoi, mais on peut le comprendre.

 » En vérité, conclue-t-il, ces déclarations doivent s’inscrire dans la perspective d’un prochain remaniement, c’est à qui criera le plus fort pour obtenir l’Intérieur ou la Justice. »

Étiquettes : , ,

Une Réponse to “Enseignement : au monde de l’absurde”

  1. Fabien Says:

    Sur l’histoire des portiques de détection, il paraît que le sujet a été traité en début de semaine sur C+ (matin ou midi, je ne sais pas), faisant arriver des enfants de primaire à 4h40 pour commencer à 9h00 (il y a peu de classes dans les écoles).

    Sur la « sélection » par Sarko des personnes habilitées à regarder dans les cartables, on va en revenir au point que je notais l’autre jour. Des gamins vont se sentir discriminés. certains n’hésiteront pas à apostropher le premier enseignant venu : « eh, zivah ! comment qu’t’veux mater mon kartab, toi ! mais t’as pas l’droit… Même l’aut’ rigolo l’a dit l’aut’ jour dans l’post’. si t’approches, j’vais t’niquer ta race ! ». Voilà pour la version sans coups. Car dans les classes, la détention de compas, cutters, et autres paires de ciseaux n’est présentement pas prohibée.

Laisser un commentaire