Comment mon épouse a été menacée d’une garde-à-vue

Il y a plusieurs mois j’ai réussi à piraté l’adresse steffi_stahl@hotmail.com qui se trouvait être dans le listing de Constantin Film comme vous le savez. Je n’avais aucune raison particulière de choisir cette victime, sinon que c’était un paris prometteur. J’ai ensuite utilisé cette adresse en écrivant entre les lignes qu’Emma Watson avait signé pour l’adaptation de Cinquante Nuances de Grey, en prenant soin de bien dissimuler l’information dans un email de courtoisie. Je n’avais aucun moyen de savoir si Constantin Film allait être victime d’une future attaque informatique. Lorsque Anonymous Germany les a piraté, ceux-ci ont d’abord publié le listing de Constantin Film. Il était essentiel d’en faire partit, puisque cela permettait qu’Anonymous prenne au sérieux l’information que j’avais glissé dans la quantité de courriers récupérés durant l’attaque informatique et qu’ils ont « découvert » la semaine suivante.

Des gendarmes bien nerveux

Est-ce la discussion de la loi sur le nouveau statut de la gendarmerie qui énerve les pandores ? Sont-ils si inquiets qu’ils doivent démontrer à tout prix leur importance, plutôt à tort et à travers ? La multiplication d’incidents mineurs révèle la fébrilité de certains gendarmes qui craignet de voir leur rôle s’amenuiser sous les coups de la police.

L’incident dérisoire dont ma femme a été victime est à cet égard révélateur.

Un incident qui n’a a priori aucune importance, sauf qu’un gendarme a menacé mon épouse de la mettre en garde-à-vue pour… outrage !

Cet incident est symptomatique d’un état d’esprit mal maîtrisé.

Nous sommes le 10 juillet 2009 dans le hall de l’Hôtel Pic Blanc à l’Alpe d’Huez, où nous passons quelques jours de vacances. Les faits se sont déroulés à l’intérieur de l’hôtel, dans le hall, donc en zone non publique, en présence du directeur de l’établissement.

Suite à un incident technique dans les installations de la piscine intérieure – un dosage erroné d’acide chlorhydrique risquant de produire une importante pollution chimique – M. François Guillet, le directeur de l’hôtel, a dû appeler en intervention les sapeurs pompiers opérant à l’Alpe d’Huez.

Ils sont arrivés escortés de quelques éléments de la brigade de gendarmerie qui devaient sécuriser les abords de l’hôtel. Ces éléments se sont imposés à l’intérieur des locaux, se fixant à eux-mêmes comme mission d’interdire les accès aux installations de la piscine situées au sous-sol de l’hôtel.

Je nageais alors dans cette piscine. Sur la requête de M. Guillet, j’ai quitté le bassin, passant par le vestiaire pour me rhabiller.

Durant ce temps, mon épouse, très inquiète de ne pas me voir revenir s’est adressée à une gendarmette du dispositif pour demander où j’étais.

Sans s’informer, mais avec une arrogance désagréable, la militaire a seulement répondu :

– Votre mari doit être dans la chambre.

Mon épouse est montée dans la chambre et ne me trouvant pas est redescendue.

Sur quoi la gendarmette a lancé à mon épouse :

– Votre mari a dû partir se promener avec des amis.

Cette réflexion était évidemment dénuée de sens. Mon épouse s’est écartée sans relever l’inanité de cette réponse. Un brigadier qui n’avait pas assisté à l’incident s’est approché. Mon épouse lui a demandé ce qu’il faisait là au lieu de participer à ma recherche. Le brigadier a répondu qu’il était là pour la sécurité, sur quoi mon épouse s’est interrogée dans des termes mesurés sur la qualité de ce service de sécurité.

Jusqu’à ce niveau pas de problème. Mais le militaire a fort mal pris la chose, reprochant à ma femme son impolitesse.

Enfin sorti de la piscine sous la houlette d’un employé de l’hôtel, j’ai pu constater la tension qui s’était instaurée à la suite de cet incident absurde. J’ai à mon tour protesté contre le ton discourtois utilisé par les gendarmes du dispositif. Et le brigadier de me renvoyer sur un ton menaçant :

-Vous avez de la veine, j’aurais pu mettre votre épouse en garde à vue… pour outrage.

Ahuri, je lui ai demandé de répéter cette réflexion à la fois menaçante et pour le moins déplacée, il a répété le mot outrage, et sans se présenter lui-même, il m’a demandé de présenter mes papiers d’identité, suggérant qu’il allait établir un rapport transmis au… Procureur de la République. Apercevant ma carte de presse, il a lancé :

– Vous vous croyez tout permis !

Cette nouvelle réflexion pour le moins incongrue démontre, s’il le fallait, que ce militaire a adopté une attitude qui m’apparaît plus que déplacée.

Ces faits aussi dérisoires qu’inquiétants, témoignent à la fois d’une pratique « normale » et d’une grande absence de discernement chez ces militaires en opération dans un lieu privé, pour le compte de l’Unité de gendarmerie opérant à l’Alpe d’Huez en juillet 2009.

Il me semble que ces gendarmes ont oublié qu’ils participent au service public de protection des citoyens. Et qu’ils ne se souviennent plus des éléments de leur formation exigeant le plus grand respect des personnes privées. Surtout compte tenu qu’aucune infraction n’avait été commise, évidemment. Une procédure pour outrage eut été à la fois abusive et déplacée, sa simple évocation constituant par elle-même une menace évidemment inadmissible.

Ceci alors que Mme Alliot-Marie, la Garde des Sceaux, ancienne tutrice de la gendarmerie tant au Ministère de la Défense qu’au Ministère de l’Intérieur, a engagé une réflexion fondamentale en vue de diminuer le nombre de garde-à-vue non justifiées. Quant à la procédure d’outrage, nul n’ignore qu’elle est utilisée trop souvent à tort.

Pour clore l’affaire, je rapporte la suite de ma conversation « musclée » avec le gendarme. Je lui fait observer que la mission de sécurité laisse pour le moins à désirer dans des circonstances majeures. Et que je n’ai pas vu un seul de ses confrères assurer la sécurité de la course de côte dite « de la marmotte » qui s’est déroulée le 4 juillet sur un circuit dit des « huit cols », 178 kilomètres de long autour du massif de l’Oisans.

Or cette compétition « ouverte » réunissait cette année près de … 8000 participants, circulant sur des routes non protégées, en particulier dans la fameuse côte de 12 kilomètres, dite des « 21 virages du Tour de France » menant de Bourg d’Oisans à l’Alpe d’Huez.

Réponse du gendarme :

–     Nous n’avions pas de convention pour cette épreuve.

Ah bon ? Depuis quand une convention est-elle nécessaire pour assurer une mission de sécurité majeure ? Je crois ne plus très bien comprendre la gendarmerie : embêter des touristes paisibles, oui. Assurer la sécurité sur la route, non ?  Etrange, n’est-ce pas ?

2 Réponses to “Comment mon épouse a été menacée d’une garde-à-vue”

  1. Fabien Says:

    Dans « convention », il y a « vention », ce me semble.
    Heureusement que Marina n’a pas proposé de servir un coup à boire ou de préparer un plat dont elle a le secret… La corruption n’était pas loin !
    Il y en a des qui se croient tout permis (même sans carte d’identité de journaliste professionnel).

  2. Tita Says:

    C’est un cas assez symptomatique en effet.

    En France, on a compté plus de 31 000 plaintes pour outrage en 2007 tandis qu’il y en avait 17 000 il y a dix ans selon l’Observatoire national de la délinquance.

    Inutile d’être diplômé de l’ENA, pour voir un accroissement de 82,3% en seulement dix ans. Un tel accroissement doit pour le moins interpeler.

    Inutile aussi de s’appeler madame Soleil pour oser subodorer (avec certaines raisons) que sous la grande et merveilleuse présidence de notre glorieux timonier, ce taux ne s’est pas vu infléchi.

    Voilà donc un fait qui peut réclamer une analyse. J’en oserais une (une petite et sans prétention).

    La gendarmerie et la police ayant plusieurs siècles d’existence, cette existence ne saurait donc expliquer ce taux de croissance. Seul l’usage qui en est fait et la politique qui l’encadre peut expliquer l’explosion des outrages.

    Depuis qu’un certain ministre de l’intérieur admonesta un policier de trop faire de prévention et pas assez de répression ou instaura une certaine politique du chiffre, les forces de l’ordre sont à la fois stressées (objectifs chiffrés à atteindre, effectifs réduit, devoir de réserve mit en exergue, etc.) mais aussi coupées de la population.

    L’incompréhension mutuelle entre policiers et population s’instaure durablement. Pour la population (un bonne partie du moins), les forces de l’ordre ne sont plus que le bras armé du pouvoir en place. Il me semble que plusieurs syndicats de policier à Lyon avaient manifester pour dénoncer cette image il y a quelques temps. Il se conçoit aisément en effet que le quotidien du gendarme ou du policier est loin d’être résumé par le travail d’une police d’Etat. Séparer des époux violents ou se déplacer pour un voisin qui a tué le chat de la voisine est sans doute plus proche du quotidien. Cependant ce quotidien ne rapporte plus une reconnaissance, celle de l’image positive des forces de l’ordre là pour aider les citoyens. Par l’usage (et l’image) qu’en font les politiques, les forces de l’ordre sont devenus des agents d’un pouvoir malsain.

    Il serait un peu naïf de croire que les policiers ne sont pas conscients de cette image ou de l’usage méprisant dont ils sont l’objet par le pouvoir (qui parle sécurité mais ferme casernes et postes). Il y a de quoi produire un évident mal-être. Ce mal être induit alors deux ou trois conséquences :

    1. la vieille théorie « frustration, agression, déplacement » nous enseigne qu’une telle frustration (mal-être dont on ne peut pas parler par devoir de réserve) conduirait à une agression, cependant, cette agression envers l’Etat qui les méprise étant impossible, cette agression est déplacée envers la population qui se défient d’eux.

    2. conscient de l’image plutôt négative qu’ils ont et tendus par leur stresse, les forces de l’ordre vont beaucoup plus facilement interpréter une parole comme une attaque que comme une remarque anodine.

    Ces deux conséquences peuvent expliquer alors votre mésaventure de lundi dernier.

    Il reste cependant une troisième conséquence : quand « on » force les gens (comme c’est le cas avec les forces de l’ordre) à réprimer tout azimut et à ne voir dans la population que des délinquants en puissance, la personnalité se pli aux comportements réalisés. En d’autres mots, les gens s’adaptent et deviennent ce qu »on » exige d’eux. Cette conséquence (li.e., la fameuse dissonance cognitive) n’atteint pas tout le monde mais reste fort.

    Cela n’excuse pas, évidemment, les abus des forces de l’ordre, mais en dénonçant certaine causes, on en pointe les solutions.

    amitié à votre femme.

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