Vidéo surveillance : les questions

Il y a plusieurs mois j’ai réussi à piraté l’adresse steffi_stahl@hotmail.com qui se trouvait être dans le listing de Constantin Film comme vous le savez. Je n’avais aucune raison particulière de choisir cette victime, sinon que c’était un paris prometteur. J’ai ensuite utilisé cette adresse en écrivant entre les lignes qu’Emma Watson avait signé pour l’adaptation de Cinquante Nuances de Grey, en prenant soin de bien dissimuler l’information dans un email de courtoisie. Je n’avais aucun moyen de savoir si Constantin Film allait être victime d’une future attaque informatique. Lorsque Anonymous Germany les a piraté, ceux-ci ont d’abord publié le listing de Constantin Film. Il était essentiel d’en faire partit, puisque cela permettait qu’Anonymous prenne au sérieux l’information que j’avais glissé dans la quantité de courriers récupérés durant l’attaque informatique et qu’ils ont « découvert » la semaine suivante.

A la demande de l’Association des Auditeurs de l’INHES (prochainement INHESJ), j’ai développé les différentes questions que l’on se pose à propos de la vidéo surveillance. Je vous communique ce texte qui, comme on le verra, est assorti de plusieurs références bibliographiques et de liens hypertextes.

Questions :

– Vidéo surveillance ou vidéo protection ?

– L’ampleur de la vidéo surveillance

– efficacité et rapport coût efficacité

Nous sommes à Londres, mon ami journaliste chez lequel j’étais invité à déjeuner m’avait donné rendez-vous à la sortie d’une station de métro pour me conduire en voiture chez lui. Il est en retard. Au bout d’un long moment, je le vois arriver à pied, avec un air embarrassé. Explication

– Je n’ai trouvé une place que très loin d’ici. Or pas question de s’arrêter même un instant sur l’avenue pour te prendre. Je serais immédiatement repéré par une caméra. Et, le lendemain, contravention.

Ainsi, la vie des Londoniens est-elle maintenant empoisonnée par la surveillance généralisée. Il ne s’agit pas d’un réseau de caméras lourdes comme celles qui sont disposées dans Paris, en particulier pour des motifs de sécurité publique. Mais de la prolifération des mini caméras. Plusieurs centaines de milliers à Londres, 90 000 pour les seules voies publiques, plusieurs dizaines de milliers à Paris. Probablement : 400 000 systèmes de vidéosurveillance sont installés aujourd’hui en France, soit 2 à 3 millions de caméras pour tout le territoire français, selon Philippe Melchior, Président du Comité de pilotage stratégique de la vidéosurveillance. Il estime à 12 000 le nombre de caméras sur la voie publique.

60.000 caméras supplémentaires vont être installées dans les rues de France d’ici à 2011, dont un millier à Paris, contre un parc global de 20.000 actuellement, a annoncé Brice Hortefeux. Le ministre de l’intérieur a rappelé que la vidéosurveillance est devenue l’un des maillons essentiels de la politique de sécurité du gouvernement.

Selon le ministère de l’intérieur, le nombre de communes ayant recours à la vidéosurveillance, toutes finalités confondues, pour filmer des espaces publics est évalué à 1.522 à la fin 2007, contre 1.142 en 2006 et 812 en 2005. Soit 50% en l’espace de deux ans. Le Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) a prévu de consacrer une enveloppe de 28 millions d’euros sur un budget total de 37 millions au développement des projets.

Le rapport du Sénat cite L’Atlas 2008 de la sécurité, panorama économique du marché de la sécurité, pour lequel « la vidéosurveillance en France aurait représenté 4,1 % du marché de la sécurité en 2006. Toutefois, il s’agirait de l’un des secteurs les plus dynamiques du marché sur la période récente. Environ 200 entreprises se partageraient un chiffre d’affaires de 750 millions d’euros en progression annuelle de plus de 10 %. »

Désormais, tous les espaces considérés comme dangereux, les stations de métro, les rues, les bus, les entrées d’immeubles, les banques sont désormais envahis par ces mouchards électroniques. Sans compter les drones qui survoleront bientôt les villes, enregistrant tout ce qui bouge. Les progrès foudroyants de la technologie ont réduit à presque rien les dimensions des caméras, dans l’ordre centimétrique au point qu’on ne distingue même plus les objectifs.

Les premières caméras de rue installées à Levallois-Perret, voilà maintenant plus de vingt ans, avaient provoqué un tollé dans l’opinion publique et dans la presse. Patrick Balkany, le Maire apparaissait dès lors comme le liberticide parfait, reprenant à son compte le monde d’Orwell.

Il était convaincu de débarrasser les rues de sa ville des voyous en tous genres, effrayés à l’idée d’être filmés lors de leurs actes répréhensibles
Deux décennies plus tard, la question ne devrait même plus se poser.

Désormais les objectifs ont pris une extension considérable. La prévention de la délinquance reste la motivation majeure, mais elle est aujourd’hui largement dominée par des buts fort éloignés.

Le rapport du Sénat s’est particulièrement intéressé système de vidéosurveillance mis en place par

« la communauté d’agglomération de la vallée de Montmorency (CAVAM) dans le Val d’Oise (95), qui fut le premier exemple de système intercommunal de vidéosurveillance (huit communes représentant 105.000 habitants).

« Selon M. Luc Strehaiano, représentant de l’Association des maires de France et président de la CAVAM, quatre ans de réflexion dans le cadre du conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance ont précédé la mise en oeuvre du projet qui a duré un an. L’accord entre les communes est intervenu le 24 mai 2006 […] Opérationnel depuis février 2007, ce système aurait contribué, pour une part qui reste toujours difficile à déterminer, à faire baisser la délinquance de 10 % en 2007 et de 15 à 20 % en mois glissants sur 2008. Sur les six premiers mois de 2008, la vidéosurveillance aurait permis 224 interpellations et 400 interventions. »

Reste en effet la question fondamentale justifiant le développement exponentiel d’un marché atteignant bientôt près d’un milliard d’euros par an :  souvent baptisée  de façon abusive vidéo protection, la Vidéo surveillance est-elle vraiment efficace ou bien n’est-ce qu’un moyen de propagande sécuritaire pour les pouvoirs publics, plus particulièrement pour les Maires en mal de tapage ? Un rapport de l’IGA révélé par Le Figaro le 21 août dernier révèle que après analyse des statistiques de la délinquance sur la période 2000-2008, à l’effet dissuasif des caméras sur la voie publique est évident.

Contrairement aux études effectuées à l’étranger, qui toutes indiquent que la vidéosurveillance n’est pas, ou peu, efficace, sur la voie publique, le « rapport confidentiel » avance que les crimes et délits chutent deux fois plus vite dans les villes équipées que dans celles qui ne le sont pas, et que les agressions, qui ont progressé de 40% depuis l’an 2000, n’y ont augmenté « que » de 20%. Dit autrement, ça ne baisse pas : ça augmente moins…

Un long article publié par Le Monde Diplomatique s’en prend vivement à la méthodologie de cette enquête, et par conséquent à ses conclusions :

« La vidéoprotection, peut-on lire dans la lettre de mission qui commandite la récente enquête gouvernementale sur son efficacité, constitue un élément majeur d’une politique de sécurité au service de nos concitoyens. »

En clair on donne la réponse dans la commande du marché, c’est plus simple.

«L’analyse des statistiques de la délinquance montre un impact significatif de la vidéoprotection en matière de prévention puisque le nombre de faits constatés baisse plus rapidement dans les villes équipées que dans celles où aucun dispositif n’est installé» . Les crimes et délits y chutent même deux fois plus vite qu’ailleurs. Les conclusions du rapport dont Le Figaro a pris connaissance mettront-elles un terme à la polémique sur les dangers réels ou supposés des caméras sur la voie publique ? A l’heure où le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, promet d’en tripler le nombre, «de 20 000 à 60 000 d’ici à 2011», ce document, daté de juillet 2009, témoigne, à tout le moins, que l’hôte de la place Beauvau avait pris quelque garantie avant de s’engager. Le travail a porté sur l’ensemble de 63 brigades de gendarmerie couvrant un territoire équipé de plus de dix caméras et sur le tiers des 146 circonscriptions de police dotées de moyens de vidéoprotection, d’Enghien-les-Bains (12 000 habitants) à Lyon (480 000 habitants) en passant par Nice, Montpellier, Tourcoing, Mulhouse et tant d’autres communes, grandes ou petites.

Le rapport précise toutefois que ses auteurs relèvent qu’il faut une « forte densité » de caméras installées, et une localisation bien pensée, pour que ces dispositifs permettent l’interpellation de délinquants sur la voie publique. « Bien qu’ils apportent une aide indiscutable (…) leur impact sur le taux global d’élucidation reste encore modéré », avançaient-ils prudemment. En dessous d’une caméra pour 2000 habitants, « les agressions progressent même plus que dans les villes qui n’ont aucun équipement »

Selon Mick Neville, responsable de l’exploitation de la vidéosurveillance à des fins judiciaires à la Metropolitan Police de Londres, en 2006, seulement 5 % des vols dans les bus auraient été élucidés grâce à la vidéosurveillance alors que chacun est équipé de douze caméras. Or, l’effet préventif ou dissuasif de la vidéosurveillance ne dure pas si elle ne permet pas d’interpeller les délinquants.

Un rapport d’information du Sénat qui a tenté de déterminer cette efficacité, glorifiée par les uns, mise à mal par les autres, ne semble pas plus décisif..

Pierre Morel-A-L’Huissier, député UMP de Lozère, a récemment demandé au ministère de l’Intérieur « de bien vouloir lui communiquer le taux d’élucidation des crimes et délits commis sur la voie publique dans les villes vidéo-protégées » (question n°45768 du 31 mars 2009).  La réponse ministérielle datée du 25 août ne manque pas d’intérêt, dans son « non dit » :

« Il n’est pas effectué de corrélation nationale entre l’existence de dispositifs de vidéoprotection et leur impact sur les crimes et délits commis sur la voie publique, ainsi que les taux d’élucidation. »

« Pour pouvoir se livrer à un tel rapprochement, il faut que la commune ait mis en place un dispositif adapté et significatif par rapport à son territoire, à sa population et aux menaces en termes de sécurité publique. Il faut également que la vidéoprotection soit opérationnelle depuis un temps suffisant pour que les comparaisons puissent être considérées comme pertinentes. »

Un article très critique de deux chercheurs Tanguy LE GOFF et Eric HEILMANN va encore plus loin, nous citons :

La vidéosurveillance a montré son « efficacité en matière de prévention de la délinquance » affirme le récent rapport du ministère de l’Intérieur1. On ne peut que se réjouir qu’il y ait enfin, en France, une tentative de mesurer l’efficacité de la vidéosurveillance.

Malheureusement, dans ce rapport, qui visait à évaluer l’efficacité de cet outil et à apporter des « arguments propres à soutenir l’adhésion » des collectivités locales, rien ne permet de conclure à l’efficacité de la vidéosurveillance pour lutter contre la délinquance.  Le rapport observe en particulier que la vidéosurveillance permet aux services de police et de gendarmerie d’élucider des affaires, mais celles-ci sont peu nombreuses et représentent une part marginale de l’ensemble.

C’est d’ailleurs la conclusion que les auteurs auraient dû tirer des chiffres qu’ils avancent. Dans l’échantillon retenu de 63 brigades de gendarmerie, 770 faits ont été élucidés grâce à la vidéosurveillance en 2008, soit 12 faits par an et par brigade (autrement dit : 1 par mois).

Dès lors, on comprend mal comment les auteurs peuvent en conclure que la vidéosurveillance génère « une amélioration significative du taux d’élucidation dans la majorité des communes équipées de vidéoprotection », Ces résultats n’ont d’ailleurs rien de surprenant. Ils ne font que confirmer les enseignements tirés des expériences anglaises. A Londres, la ville la plus équipée en caméras de surveillance, le responsable policier en charge de la vidéosurveillance à la Metropolitan Police de Londres, Mike Neuville, a déclaré que seuls 3 % des délits sur la voie publique ont été résolus grâce à la vidéosurveillance en 2006.

Même charge concernant le taux d’élucidation. Pour la catégorie « délinquance de proximité » (les atteintes aux biens et aux personnes ne sont plus ici étudiées par les auteurs), les différences selon les densités de caméras sont de l’ordre de 0,1 à 0,6 point. Autrement dit, elles ne sont pas significatives.

Marianne repasse le plat :

 

« Si les caméras garantissaient la sécurité des citoyens, Londres, la ville des cinglés de l’objectif avec quelques 500000 caméras, serait la ville la plus sûre du monde. Mais ce n’est pas le cas », juge dans un article du quotidien The Guardian Bruce Schneier, le « pape de la sécurité » américain. A raison d’une caméra pour 14 habitants, la Grande-Bretagne est le plus grand laboratoire de surveillance au monde et montre à ce titre des résultats plutôt décevant.

Selon un rapport de New Scotland Yard, la police anglaise, seuls 3% des délits de rue auraient été résolus grâce aux milliards de livres de matériel vidéo déployés sur le territoire. Même à titre préventif : les caméras n’ont pas de rôle dissuasif. Si une caméra pour 14 habitants est sans effet, on peut douter qu’une pour 1000 (comme le prévoit MAM) soit plus efficace. En cause, la qualité de l’image, le manque de lumière, le manque de coopération des malfrats qui refusent de bien rester face à l’objectif… et l’impossibilité de mettre un policier derrière chaque écran de contrôle.

A l’origine de ce débat, le fait qu’on se méprend sur la nature de la vidéo surveillance, comme le souligne dans un article intitulé « Sécurité : le mirage technologique » et publié dans « Libération » le samedi 15 octobre 2005 Laurent Mucchielli, chercheur au CNRS et directeur du Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (Cesdip) :

« On ne peut pas dire que les techniques modernes sont inutiles. Quand on sait ce que l’on cherche, ça peut aider beaucoup. Mais si on ne sait pas ce que l’on cherche, on est automatiquement noyé dans des millions d’informations dont on ne sait que faire. La technique n’est qu’un soutien logistique à un travail de renseignement alors qu’elle est présentée aujourd’hui comme la solution miracle qui produit elle-même le renseignement. C’est là qu’est l’erreur fondamentale, le mirage de «l’enchantement technologique» […] Si on met des caméras à tous les coins de centre-ville, il faudra embaucher des milliers de gens pour regarder les images collectées. Tous ces éléments techniques ne sont ni préventifs, ni dissuasifs lorsqu’ils sont dirigés vers l’espace public en général. Les techniques ne peuvent qu’appuyer les enquêtes pour trouver quelque chose après coup, si on dispose déjà de pistes. Si on ne sait pas ce que l’on cherche, la technique ne peut rien, elle est aveugle. C’est l’homme qui a des yeux et un cerveau, ce n’est pas la machine. »

Frédéric Ocqueteau, directeur de recherches au CNRS, sociologue au CERSA (Centre d’études et de recherches de science administrative), membre de l’Observatoire national de la délinquance (INHES – Ministère de l’Intérieur), affirme notamment sur le site de « Bakchich » le jeudi 26 mars 2009:

« J’ai, pour ma part, plutôt tendance à penser que l’efficacité d’un dispositif de vidéosurveillance à composante sécuritaire devrait plutôt se mesurer à une augmentation du nombre de suspects surpris en flagrant délit par les agents municipaux plutôt qu’à leur diminution, lié à un prétendu effet d’inhibition constaté parmi la population « vouée à passer à l’acte »[…].»

Et d’ajouter à propos de la volonté gouvernementale de multiplier les caméras de vidéosurveillance,

« L’Etat s’attribuerait un mérite ressortant du seul effort d’équipement des collectivités territoriales, en faisant croire que les élucidations des affaires augmenteraient. C’est peut-être un ressenti local, mais il faut également convenir qu’un maire a toujours besoin de rassurer sa population et de « communiquer » de la même façon qu’on le fait au niveau national. Il faut toujours prouver que l’insécurité dans la rue recule, et qu’on aura donc toujours eu raison de demander au public un effort fiscal plus conséquent pour investir dans de nouveaux dispositifs de surveillance. Pour l’instant, la stratégie est gagnante sur les deux plans. Et l’Etat peut multiplier par dix ou par cent le quota des caméras utiles, cela ne lui coûte rien en termes de budget national. »

La vidéo surveillance rebaptisée à tort vidéo protection, puisqu’aucune machine ne peut assurer une mission active, semble plutôt relever de l’argumentation « politique » plutôt que de l’efficacité réelle. En dotant la ville d’un système, d’une certaine manière le Maire ne garantit pas la diminution de la délinquance, mais la prise en compte de tous les paramètres de la sécurité. On réclame des renforts de police nationale ou de gendarmerie, qui ne viennent pas ; donc on veut accroître les effectifs de la police municipale, très coûteuse. En fin de compte, on croit pouvoir remplacer les « ressources humaines » par de la technologie. Gérée exclusivement par des sociétés privées tant pour l’installation que pour la gestion des logiciels de fonctionnement et la maintenance.

Le business est plus que lucratif ! Selon une étude MSI datée de mai 2008, le secteur a connu entre 2003 et 2007 une augmentation de 41%. Et le meilleur est à venir : entre 2003 et 2012 (cf. le graphique), le cabinet d’études prédit un doublement du marché du matériel de vidéosurveillance et une multiplication par 5 du marché des logiciels.

Selon certains critiques, le discours sur la vidéo surveillance serait donc destiné à masquer la diminution des effectifs de police , une nouvelle étape dans la privatisation et l’automatisation des tâches de sécurité.

Pour autant, la sécurité réelle y trouverait-elle vraiment son compte ? Il faudra attendre plusieurs années avant d’obtenir une mesure claire. En attendant, on multiplie les caméras.

Pour remplacer les Hirondelles d’antan et la Police de proximité, à Paris, un nouveau plan de développement prévoit l’installation de 1302 caméras. 293 d’entre elles, dont 202 relèvent de la Ville de Paris et 91 de l’Etat, sont dès à présent opérationnelles. + 4,4 %.

Sources – Laurent Opsomer a participé à la documentation

Rapport sur l’efficacité de la vidéoprotection, de MM. Jean-Pierre Sallaz, Philippe Debrosse, Dominique Han, pour le ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales (juillet 2009).

Rapport d’information du Sénat N° 131, session ordinaire de 2008-2009, annexe au procès-verbal de la séance du 10 décembre 2008. FAIT au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale (1) par le groupe de travail sur la vidéosurveillance, par MM. Jean-Patrick COURTOIS et Charles GAUTIER,

Vidéosurveillance, un rapport aux ordres, Noé Le Blanc, Le Monde Diplomatique, 27 octobre 2009 http://blog.mondediplo.net/2009-10-19-Videosurveillance-un-rapport-aux-ordres – forum

http://www.prefecturedepolice.interieur.gouv.fr/Actualites/Prevention/Videoprotection-mise-en-place-du-comite-d-ethique

Tanguy LE GOFF et est Sociologue à l’IAU île-de-France, chercheur associé au CESDIP. Eric HEILMANN Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université de Dijon. Pour lire ce rapport voir http://www.laurent-mucchielli.org,

Vidéosurveillance : on y renonce partout, sauf en France Marianne, Sylvain Lapoix | Mardi 17 Février 2009


5 Réponses to “Vidéo surveillance : les questions”

  1. Tita Says:

    Si je comprends ce très bon article, très détaillé et intellectuellement très nourrissant, on peut résumer la situation comme suit :

    1) Il existe un réel engouement des hommes et des femmes politiques pour la télésurveillance. L’argument qu’ils avancent pour la justifier, c’est un efficace effet de dissuasion.

    2) Hélas ! Toutes les études montrent cependant que la vidéo-surveillance n’a pas ou peu d’impact sur la délinquance.

    3) Toutes ? Non ! Une étude du ministère de l’intérieur français résiste encore et toujours à la réalité. Je me permets cet humour puisque moult personnes ont montré des failles d’importances dans cette étude confidentielle.

    4) Le seul impact connu de la vidéo-surveillance n’est pas dans la dissuasion mais dans l’aide à résoudre des affaires déjà existantes. Après tout, quand on sait ce qu’on cherche, on peut le trouver. Sinon, l’information passe inaperçue comme une goûte d’eau dans une rivière d’informations inutiles. Cependant, cette aide reste très marginale et ne saurait justifier les sommes colossales dépensées dans l’équipement et l’entretien des caméras de surveillance.

    5) Puisque ce ne peut pas être « l’efficacité sur le terrain » qui motive vraiment les hommes et femmes politiques pour la télésurveillance, vous proposez avec raison une « efficacité électorale ou de marketing » : Cacher la diminution des effectifs policiers par de coûteux « grigris vaudou », fussent-ils technologiques, sensés protéger les honnêtes citoyens.

    Ai-je bien compris ?

    Une fois n’est pas coutume, je vais aller dans le sens du gouvernement. Je pense que se savoir épier par une caméra peut être dissuasif. Cependant, cette dissuasion concerne les gens déjà honnêtes, pas les délinquants. Des études ont montré que placer des miroirs devant les étudiants en examens diminuait significativement le taux de tricherie. L’explication donnée est que l’étudiant s’auto-surveille pour ne pas donner (même à lui-même) une image négative. Bref, le miroir le conduit à prendre plus conscience de lui-même et le renvoie à ses valeurs.
    On peut raisonnablement penser que la présence de caméras de surveillance renvoie aussi Monsieur Beta (ou Madame Lambda — ne soyons pas sexiste–) à son comportement. Il se surveille donc plus. C’est un peu ce qui est arrivé à votre ami londonien. Le fait de se savoir surveillé l’a poussé à s’auto-surveiller avec plus de rigueur. Dans ce sens, la vidéosurveillance peut jouer un rôle, mais un rôle de contrôle social.

    Pour les délinquants (qui se savent déjà voleurs, casseurs, etc.) leur image est déjà faite et se surveiller ne sert donc à rien. L’effet est donc anéanti. Pie ! On peut même envisager que la présence d’une surveillance accentue le désir de la provoquer et on provoque d’autant plus une autorité qu’elle est faible (moins d’une caméra / 2000 hab. par exemple). A ce moment, l’effet boomerang remplace celui de dissuasion.

    Je ne sais pas si pour oser mériter le mot « d’efficacité », dans le futur, des programmes informatiques parviendront à analyser les images et rendre saillant les comportements déviants, augmentant ainsi l’aide réelle des vidéo-surveillances. Je ne sais pas si c’est même souhaitable. Par contre, ce qui est certain, c’est la tromperie des politiques. Que d’aucuns d’entre eux soient sincèrement persuadés de l’efficacité de la surveillance vidéo, je le conçois. Qu’ils osent investir massivement dans ce marché sur la base de simples croyances, me gène déjà un peu. Par contre, qu’on écrive les conclusions que l’on souhaite d’une étude « confidentielle » sans respect des données ou d’une méthode scientifique d’analyse des données, cela est impardonnable. C’est du prémédité. C’est construire une réalité illusoire pour cacher son incompétence à gérer la réalité nue. C’est aussi être irrespectueux envers les personnes à qui on s’adresse. C’est enfin, pour qui se targue de s’occuper de la chose publique, un manque flagrant d’une qualité essentielle : être responsable.

    Pour l’heure, cet engouement des hommes et des femmes politiques pour la télésurveillance m’apparaît comme une fuite en avant. C’est peut-être pour cacher la réalité des diminutions d’effectifs, palier aux insuffisances des forces de l’ordres, ou que sais-je. Cependant, plus on donne d’importance au caméra, plus le retour à la réalité risque d’être difficile.

  2. Opsomer Says:

    Une étude à transmettre d’urgence aux édiles parisiens !

    La vidéosurveillance en débat au Conseil de Paris
    http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/11/23/la-videosurveillance-en-debat-au-conseil-de-paris_1270621_3224.html

  3. Opsomer Says:

    Trop tard pour Paris !

    Conseil de Paris : adoption du plan de vidéoprotection
    http://www.lagazettedescommunes.com/actualite/det_artNL.asp?id=36560&supportId=56

  4. Opsomer Says:

    Montpellier. Du bon usage de la vidéosurveillance
    http://www.midilibre.com/articles/2009/11/29/MONTPELLIER-Du-bon-usage-de-la-video-1016247.php5
    Les avocats ont-ils déniché la faille juridique dans l’utilisation de la vidéosurveillance à des fins d’enquête par des fonctionnaires de police municipale, qui n’ont pas la qualification judiciaire nécessaire ? En effet, leur qualité d’agent de police judiciaire adjoint reconnue par l’article 21 du Code de procédure pénale (APJA21) ne leur confère aucun pouvoir d’enquête contrairement aux agents de police judiciaire (APJ20) et officiers de police judiciaire (OPJ) de la gendarmerie et de la police nationale.

  5. Opsomer Says:

    Comme le remarque judicieusement un ami, « Il faut espérer que cette affaire ne va pas une nouvelle fois inciter le législateur à prendre de nouveaux textes destinés à développer les prérogatives des APJA en matière de rassemblement des preuves ou, pire, en permettant à certains municipaux (Chefs de service par exemple) d’accéder à la qualification d’OPJ… »

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